Musiques de Syrie au Festival de l’Imaginaire

Musique de syrie - waed Abou hassoun
Musique de syrie - waed Abou hassoun

La Syrie est un carrefour où se rencontrent différentes cultures, notamment musicales. Avec plusieurs concerts qui témoignent de cette richesse, le 14ème festival de l’imaginaire donne la possibilité de découvrir la jeune scène musicale syrienne, avec des genres et itinéraires musicaux variés et inattendus…

Le Festival de l’Imaginaire, organisé par la maison des cultures du monde, nous a habitués à voyager à travers le monde des cultures et des expressions artistiques. Pour sa 14ème édition, le festival donne une place particulière à la scène musicale syrienne, avec trois genre musicaux différents et pourtant entrecroisés, de Hamam Khairi, la grande voix d’Alep, aux virtuoses des luths, sans oublier bien sûr Waed Bouhasoun, la jeune syrienne à la voix rare…

Quand le Soufisme rencontre le Flamenco

Avec la voix de Waed Bouhassoun, c’est des chants d’amour d’Andalousie ce dont il s’agit. Pour le faire, il fallait que la chanteuse syrienne rencontre les deux frères espagnols Curro et Carlos Piñana. Découverte lors de l’édition 2005 du festival, cette chanteuse possède un timbre de voix d’une qualité rare, comme on n’en entend plus qu’exceptionnellement, unique et évoquant pourtant les grandes voix de la chanson arabe des années trente. Brillante aux côtés d’ensembles orientaux, Waed Bouhassoun chante et compose également en solo, accompagnée de son seul ‘ûd. Poèmes d’amour, poèmes soufis, c’est toujours à l’amour que la chanetuse prête sa voix envoûtante et douce, forte et fragile. C’est un amour absolu, en totale adéquation avec le personnage de Râbi’a Al Adawiya, grande soufie d’Irak, mystique et tragique à la fois. Ainsi, elle est l’initiatrice de la mise en musique des poèmes d’amour qu’échangèrent, il y a près de mille ans, Wallada Bint al-Mustakfi et Ibn Zaydoun, dont l’idylle tourmentée, passionnée, donna lieu à quelques-uns des plus beaux vers de la poésie arabo-andalouse.

Pur, sobre et profondément beau, tel est le chant de l’Espagnoll Curro Piñana. Distingué à de nombreuses reprises par les plus prestigieux concours de chant flamenco, Curro Piñana est issu d’une longue lignée de musiciens de très grand talent parmi lesquels son grand-père, maître des cantes mineros et son père, le grand guitariste Antonio Piñana. Il a également travaillé à l’adaptation flamenco des poèmes du grand mystique soufi Ibn Arabi (Murcie 1165 – Damas 1240).

Ce sont ces textes et cette sensibilité partagée que Waed et Curro uniront, accompagnés de Carlos Piñana et du percussionniste Miguel Ángel Orengo, pour un concert comme une conversation intime entre deux grands artistes qui laissera toute la place à l’improvisation.

Hamam Khairi, la grande voix d’Alep

Alep, ville natale de Hamam Khairi, est l’une des plus anciennes cités du monde. Creuset des cultures et des arts nichés entre l’Anatolie et le plateau du nord syrien, la ville est considérée, aujourd’hui encore, comme étant le cœur de la musique arabe. On y retrouve des genres différents tels que le muwashshah andalou et des formes plus populaires comme les qudud d’Alep, chants traditionnels dansants, et la qasseeda. En effet, depuis toujours, Alep est réputée tant pour la finesse et la diversité de ses traditions musicales que pour l’exigence de ses maîtres. C’est ainsi que Hamam Khairi a réussi ce pari. Interprète de chants exigeant une grande maîtrise, l’artiste fait preuve d’une grande aisance dans les variations et l’improvisation dans des registres savants aussi bien que populaires. Résolument moderne, il n’en reste pas moins toujours respectueux de la tradition, ses récitals évoluent entre créations et refrains puisés dans les répertoires classiques. Le chanteur a grandi entouré de maîtres de renom comme le fameux Sabah Fakhri et Sabri Moudallal.

Les virtuoses des luths

Le luth a longtemps été considéré par l’école musicale arabe comme un simple instrument d’accompagnement du chant. Ce n’est qu’au XXème siècle, que le luth (‘ûd)  a commencé à rayonner et à voir émerger de grands noms tels que Jamil Bachir, Salman Shukr et Munir Bachir. Près de soixante-dix ans plus tard, les jeunes musiciens syriens Kinan Adnawi, Mohammed Osman et Ibrahim Keivo, renouvellent la tradition savante des ‘ûd , buzuq et baghlama en croisant les influences et en introduisant de nouvelles formes musicales, démontrant par là l’exceptionnelle souplesse des luths arabes. Ce concert montre la vitalité de la jeune scène musicale syrienne solidement ancrée aux traditions musicales arabes mais en même temps résolument ouverte au monde.

Programme détaillé du 14ème Festival de l’Imaginaire du 3 mars au 25 avril 2010.